par Thomas Duret
je suis le seul à me trouver drôle
je repense à des jokes des années plus tard
à chaque fois que je prends mon vélo
je me demande si je vais revenir en vie ou finir en statue fantôme
un memorial à tout ce que je n’aurai pas été en dessous d’un viaduc
un peu trop sombre un peu trop grand
comme ce qui habite chez moi
j’ouvre mon ventre et je vois des chandelles
j’ai une grande tendresse pour les étranger.es qui me parlent comme
si on se connaissait depuis des années
je vois des cris stridents sortir des bouches d’égouts
les gens prennent la pose devant les arbres qui strip-teasent
je sens une cascade de pression redescendre dès que je mets le pied chez moi
j’ai voulu noter des tas de choses cette semaine
mais le cahier était toujours trop loin pendant l’orage
mon sang fait du yoga dans ma trachée
j’ai la gorge nouée comme un nœud coulant
de l’eau
au pied de la chute de la bruine d’amertume se dépose sur mes cheveux
j’espère qu’ils deviendront gris avant de tomber
on a tous les mêmes obsessions
je casse des œufs sur la tête des gens qui me disent non
parce que le temps c’est du poivre
j’en mets quand je veux épicer les choses
vu d’ici les gens semblent toujours me décevoir
peut-être que je devrais laisser mes jumelles
sur leur piédestal de peau de rose
ici il y aura toujours des traumatismes colorés
ici il y a toujours des plantes grimpantes prêtes à me dire oui
[Thomas Duret est un artiste multidisciplinaire œuvrant à Montréal depuis 2012, autant en arts vivants (avec la compagnie Baobab — Création multidisciplinaire) qu’en poésie. Son premier recueil de poésie GLIMPSE/ÉCLATS a été publié en 2018 et son deuxième recueil Ce qui existe entre le ciel et la terre est à paraître en octobre 2019. Ses textes ont été publiés notamment dans les revues H, Zeugme, Nyx et Caractère. Son texte En survolant la Mer Égée vient de remporter le Prix CEAD, décerné au meilleur texte dramatique du Festival ZH. Il s’intéresse à tout ce qui s’écroule et disparaît sous nos yeux, absorbé par la terre.]