par Lénaïg Cariou
pour Louise Stomps
le matin, la mort sur les visages
toujours, ton regard hante
étendues gelées à perte de vue
les sillons de l’hiver comme les rails du train
jamais tout à fait où je vais
entre aujourd’hui et demain
dans le froid piquant un soulagement certain
des lacs comme des trous
toujours, les cadavres dans la cave
hier, le corps sous la scène
caisse de résonnance leurs coups
elles courent, heurtent le mur du fond
le poids des corps sur le revêtement noir
ses cheveux bleus dans l’ombre
se rappeler la lumière comme on se rappelle le sud
le jour peut durer, encore
et pourtant ton visage et la peau des arbres noueuse
les taches brunes de tes joues le gris de tes yeux
appliqués
creuser des sillons dans la matière morte
partir des corps créer des ombres
elle dit qu’il n’y a pas de sacrifice
des silhouettes, tout au plus
l’espace entre les troncs qui ondule
elle qui fixe l’objectif
spectrale
.
[Née en 1993, à Clermont-Ferrand. Après avoir étudié à Paris, et passé quelques temps aux États-Unis, elle vit actuellement à Berlin. Chercheuse et poète, elle est l’initiatrice du Festival Poet.e.s.s.e.s et co-édite la revue Point de chute. Ses poèmes paraissent régulièrement en revues, en France et en Amérique du nord (Le Pied, The Goose, L’Intranquille, L’écharde, Traversées, Poezibao, Jef Klak…). Elle traduit également de la poésie nord-américaine contemporaine en français avec le collectif Connexion Limitée / Limited Connection. Leur traduction du recueil de la poète mexicano-américaine Mónica de la Torre The Happy End / Bienvenue à tous paraît en novembre 2021 aux éditions Joca Seria.]